Chabbath Parachat Vayéra

14, 15 novembre 2003 – 19, 20 mar‘hechvan 5764

A Jérusalem

Allumage des bougies : 16 h 05

Sortie de Chabbath : 17 h 18

A Paris

Allumage des bougies : 16 h 54

Sortie de Chabbath : 17 h 59

Très chers amis,

J’ai le plaisir de vous adresser le DVAR THORA après quelques semaines d'interruption.

Ayant constaté l’intérêt grandissant pour nos publications hebdomadaires, et suite à la demande de nombre d’entre vous, nous avons décidé de poursuivre cette entreprise. Nous vous prions de transmettre ce dvar Thora à votre entourage et de nous faire part de vos remarques.

Cette semaine, nous commençons un cycle de réflexion sur les Pirké Avoth, « Maximes des pères ».

Ce dvar Thora est dédié à la Bar-mitsva de Robert Abraham SITRUK et de Its’hak GABAI ; nous leur souhaitons un grand mazal tov ainsi qu'à leurs familles bien connues de la communauté juive de France pour leur engagement et leur soutien aux différentes œuvres.

Avec notre plus cordial Chabbath Chalom

Rav Chalom Bettan


Chabbath Parachat Vayéra

D.ieu, les hommes et la morale

Par le Rav

Eliahou Elkaïm

La première Michna du traité Pirké Avoth, « Maximes des Pères », nous enseigne que les principes d’éthique ne peuvent être véritablement découvert par l’homme, trop influencé par les modes, ses intérêts ou son caractère. Seule une transmission du message divin peut nous permettre de devenir meilleurs…

« Moïse reçut la Thora du Sinaï, il la transmit à Josué, Josué aux Anciens, les Anciens aux Prophètes, et les Prophètes la transmirent aux hommes de la Grande Assemblée. Ceux-ci disaient trois choses : Soyez circonspects dans le jugement, élevez de nombreux disciples et faites une haie autour de la Thora. »

Pirké Avoth (1 ; 1)

Voici donc la traduction de la première Michna du traité couramment appelé « Maximes des Pères ».

En réalité, cette appellation n’est pas exacte dans la mesure où le titre fixé par l’auteur de la Michna est « Avoth », c’est-à-dire « Pères ».

Dans un texte manuscrit du Gaon de Vilna, ce titre est expliqué de la façon suivante :

« La terminologie talmudique utilise le concept de Av (père) pour exprimer l’origine d’une idée, d’un concept ou d’un système de lois. A l’instar d’un père qui est à l’origine de sa descendance, les notions de bases d’une réflexion sont les fondements de tous ses développements, qui n’en sont que les ramifications.

Ces notions de bases sont appelées

Avoth (pères). »

(cf. Talmud Baba Kama p. 2a et Chabbath p.73a )

En utilisant ce titre, nos maîtres ont exprimé l’idée que l’ensemble des développements ultérieurs de ces sujets, dans tous le corpus talmudique et midrachique, trouveront leurs racines dans ces quelques chapitres.

En approfondissant les enseignements des

Pirké Avoth,

on découvrira les bases de tous les préceptes relatifs au comportement, légués par la Thora pour élever l’homme.

Seul D.ieu nous connaît vraiment

La première partie de cette Michna, dont nous avons donné la traduction ci-dessus, qui précise les différentes phases de la transmission de la Thora, et qui introduit le traité « Pirké Avoth » (celui de l’Ethique), semble a priori hors sujet.

Il aurait semblé plus logique de placer cette première phrase en introduction générale des six

sedarim

de la Michna, au début traité Bera’hot .

Quelle est donc la raison de ce positionnement ?

Dans son commentaire, Rabbénou Ovadia offre une première explication.

A la différence des autres traités de la Michna,Avoth

ne développe pas des lois relatives à une mitsva

spécifique, mais il est entièrement consacré à la Morale et aux

midoth, dispositions du caractère.

Bien entendu, ces sujets ont été également traités par les philosophes et les sages non-Juifs.

Certains auraient pu imaginer que les maîtres de la Michna, à l’instar des moralistes, ont découvert des principes d’éthique à travers leur propre réflexion. Et que leur recherche avait pour but un meilleur fonctionnement de la société.

La Michna, par son introduction, précise que ces enseignements font aussi partie intrinsèque de la loi orale, qui a été révélée par D.ieu à Moïse au Mont Sinaï, et retransmise de génération en génération.

Notre premier chapitre met donc en avant le concept de transmission face à l’idée d’une découverte autodidacte.

Car seul D.ieu, qui a créé l’homme et connaît les secrets de l’âme, peut nous transmettre des principes de morale qui soient des vérités absolues, et non relatives à telle ou telle conjoncture.

Et D.ieu ne souhaite peut-être pas que nous devenions meilleurs uniquement pour des raisons techniques, liées au bon fonctionnement de la société…

L’homme doit perfectionner sa personnalité pour des raisons beaucoup plus profondes. C’est ainsi qu’il pourra se rapprocher de Son Créateur.

Quoiqu’il en soit, même quand il s’agit de trouver des solutions réelles pour une justice sociale et un équilibre mondial, on constate aujourd’hui l’échec général de l’homme.

L’auteur du Tiféreth Israël va plus loin encore.

La Michna (Avoth 3 ; 17) nous apprend : Im ein Thora, ein dere’h erets, ce qui signifie que sans Thora, il ne peut y avoir de véritable morale.

D.ieu sait exactement quel est notre niveau moral véritable, et quel travail nous avons accompli pour améliorer nos

midoth.

Faire tomber les masques

Or, celui qui ne possède pas une foi absolue dans les enseignements de la Thora, et leur origine divine, ne peut avoir conscience de ce fait.

Il pense qu’il peut découvrir seul les principes de la morale.

Il ignore que même s’il prône le Bien, cela peut avoir comme motif une recherche d’honneurs ou un manque de courage pour affronter la société.

S’il fuit le Mal c’est peut-être par crainte d’une autorité quelconque ainsi que des réactions de la société environnante.

Sa recherche de morale n’est donc qu’un masque, dépendant d’éléments extérieurs, ne reflétant pas un véritable travail sur soi, ni d’une volonté profonde de s’élever.

Seul celui qui agit par respect du message divin, par l’observance de la Thora peut réellement se connaître et s’élever.

La Michna vient donc, dès le départ, fixer que la base de toute morale est la foi dans la Thora et en Celui qui nous l’a léguée, trouvant ses racines dans la conviction totale que D.ieu nous a transmis la Thora au Mont Sinaï.

Dans Vayéra,la paracha

de la semaine, cette idée, celle que la véritable éthique ne peut être que d’origine divine, est exprimée de façon fulgurante.

Le chapitre 20 relate la venue d’Avraham dans la contrée de Grar, dirigée par Aviméle’h.

Ce dernier capture Sara pour la prendre comme femme, pensant qu’elle était la sœur d’Avraham et non son épouse.

A la suite d’une révélation divine dans la nuit, Aviméle’h libère Sara et lui permet de retrouver Avraham : durant cette nuit, D.ieu avait menacé Aviméle’h de lui ôter la vie.

Aviméle’h accuse Avraham d’avoir caché la véritable identité de Sara, et Avraham de répliquer :

«Voyant qu’il n’y a pas la crainte de D.ieu dans votre région, je savais que vous étiez capable de me tuer pour prendre ma femme. » (Vayéra 20 ; 11)

Et Rachi explique : « On ne demande pas à un étranger qui arrive dans une ville si la femme qui l’accompagne est son épouse ; on s’inquiète plutôt de son gîte et de son couvert. »

Avraham accuse donc Aviméle’h d’avoir eu de mauvaises intentions, sous un masque d’innocence et par manque de savoir-vivre (dere’h eretz).

Le Talmud (Baba kama 92a) ajoute qu’Aviméle’h aurait dû se rendre chez Avraham pour apprendre le réel

dere’h eretz.

.

L’homme se crée des règles de conduite qui masquent souvent ses véritables intentions.

Il y a quelques 70 ans, la société allemande avait atteint un raffinement qui était la fierté du monde civilisé.

Lors de la nuit de Cristal (9 novembre 1938), cette même société montra son véritable visage, et ce fut le début des atrocités nazies…

Le seul dere’h eretz

est celui qui a pour origine, la crainte de D.ieu, comme le dit si justement notre père Avraham à Aviméle’h.

Chabbath Chalom