Parachat Tazria - Metsora

23, 24 avril 2004 – 2, 3 iyar 5764

A Jérusalem A Paris

Allumage des bougies : 18 h 38 Allumage des bougies : 20 h 34

Sortie de Chabbath : 19 h 52 Sortie de Chabbath : 21 h 47

Très chers amis,

J’ai le plaisir de vous adresser le dvar Thora de cette semaine.

Cette semaine, nous poursuivons notre cycle de réflexion sur les Pirké Avoth, « Maximes des pères ».

Ce Dvar Thora est consacré à la mémoire de :

Serge Fradji ben Elias Haddad : 3 iyar (24 avril)

Avec notre plus cordial Chabbath Chalom,

Rav Chalom Bettan


Parachat Tazria - Metsora

23, 24 avril 2004 – 2, 3 iyar 5764

De la main de D.ieu

par Rav Eliahou Elkaïm

Cette semaine, nous allons découvrir l’un des fondements de la foi, qui va nous permettre de nous réaliser pleinement au sein de notre activité professionnelle…

« Chemaya et Abtalion reçurent d’eux la tradition. Chemaya disait : ‘Aime le travail, hais les honneurs et ne te fais pas connaître du pouvoir.’ »

(Chapitre 1, Michna 10)

« Aime le travail » : les mots de Chemaya, si on veut les lire avec attention, révèlent une véritable philosophie de vie.

Nos maîtres nous font découvrir d’ailleurs dans la Bible et les textes du Talmud, un certain de nombres de raisons qui justifient cette perspective, et lui donnent son sens véritable.

Le premier motif évoqué pour expliquer la maxime de Chemaya (par Rabbénou Yona, Rabbénou Ovadia) est d’ordre psychique.

« L’inactivité mène au déséquilibre mental »

(Talmud Ketouboth 59b)

La maxime de Chemaya s’adresse donc à tous, à ceux qui ont besoin d’assurer leur existence par une activité professionnelle, et aux autres, ceux dont la situation financière prospère dispenserait de travailler.

A ces derniers, Chemaya conseille de conserver une activité car le travail est un élément équilibrant.

D’après Rabbénou Yona, l’inactivité prolongée comporte un double danger : outre le déséquilibre psychique qu’elle risque de causer, l’oisiveté génère une paresse qui devient, avec le temps, une nouvelle nature.

Même si au départ une personne n’est pas paresseuse, elle le deviendra par habitude, et par la suite, elle sera incapable de changer d’attitude, même si elle le souhaite.

Les devoirs du cœur

Le deuxième motif (Rabbénou Yits’hak) est d’ordre médical. L’activité physique exigée par le travail active la circulation sanguine, ainsi que le bon fonctionnement du système digestif, ce qui permet un sommeil serein et réparateur.

Le troisième motif touche à la réputation d’une personne. Celui qui n’exerce pas une activité pourra être soupçonné de pratiques malhonnêtes pour assurer sa subsistance.

Pour cette même raison, nos maîtres ont d’ailleurs déconseillé (Talmud Kiddouchine 82a) d’apprendre à son fils un métier qui comporte une ambiguïté, même lorsqu’elle n’est qu’apparente, sur le plan de la morale.

Le dernier motif (Rachi, Rabbénou Yits’hak) évoque l’élément protecteur d’une activité professionnelle pour la dimension morale de l’homme.

« Le travail est nécessaire pour l’homme car pendant que son esprit est occupé par son activité professionnelle, il ne risque pas de transgresser les lois de la Thora ou d’agir de façon indécente.

C’est la raison pour laquelle nos maîtres ont tellement insisté sur l’obligation d’enseigner la Thora à son fils, et ensuite seulement de lui apprendre un métier. » (Rabbénou Yits’hak)

L’auteur des « Devoirs du cœur » (Hovoth Halevavoth, Chaar habita’hon, chapitre 3), développe cette idée de façon très percutante.

« L’un des principes fondamentaux de la foi est que l’initiative de l’homme (hichtadlout) n’est pas la vraie cause du succès ou de l’échec de ses entreprises, et cela dans tous les domaines de la vie.

Seule la volonté divine permet aux hommes de mener à bien leurs actions.

Depuis la faute d’Adam, cette hichtadlout

est nécessaire mais elle n’est pas pour autant la raison véritable de la tournure que prennent les événements.

En toute liberté

Avant la faute, l’homme jouissait de tous les bienfaits matériels, sans avoir à agir.

Après avoir été chassé du Gan Eden, l’homme a dû, et doit encore, fournir des efforts pour assurer sa subsistance, même si elle lui est, de toute façon, accordée de la main de D.ieu.

Mais pourquoi a-t-il fallu créer la situation qui est la nôtre aujourd’hui, situation trompeuse puisque l’homme peut imaginer être, par ses qualités, le facteur décisif de sa réussite ?

Car concrètement, c’est D.ieu, et Lui seul, qui est à l’origine de tout, Lui qui ne connaît aucune limite.

Si notre monde fonctionne ainsi, c’est pour deux raisons : la première est que D.ieu a voulu que l’homme puisse choisir en toute liberté d’accomplir ou non Sa volonté.

C’est ainsi qu’il méritera véritablement la rémunération divine.

Pour préserver ce libre-arbitre, l’homme évolue dans un système où il doit œuvrer pour sa subsistance.

De cette façon, il est confronté à chaque instant à des situations dans lesquelles il devra choisir entre les directives de la Thora et sa propre volonté.

Ainsi, il aura l’occasion, en permanence, de concrétiser son attachement à D.ieu.

La deuxième raison est la suivante : si l’homme n’était pas obligé de peiner pour trouver sa subsistance, il oublierai les bienfaits de D.ieu et serait tenté de ne chercher que la jouissance, encore et toujours, allant à sa perte.

C’est donc par amour pour l’homme que D.ieu l’a placé dans un monde où toutes les conditions sont réunies pour l’aider à se rapprocher de Lui, en toute liberté, et le mettront à l’abri de nombreuses tentations.

Rabbénou Bahya ajoute que le juste (tsadik) n’a pas besoin de ces contingences, car il vit une réalité spirituelle intense, par laquelle il a l’occasion, en permanence, de montrer son attachement à D.ieu et à Sa volonté.

Il n’a pas besoin d’être occupé par le travail pour éviter la faute et les tentations : c’est pourquoi sa subsistance est assurée directement par la main de D.ieu.

C’est ce que le verset des Proverbes (10 ; 3) exprime en disant :

« L

’Eternel ne laisse pas l’âme du juste souffrir de la faim »

Nous comprenons à présent que seul celui qui a comprit pourquoi D.ieu a voulu que nous travaillons pourra s’épanouir : seul celui qui a intégré les paroles de Chemaya connaîtra les véritables raisons de son effort, ne confondant pas les objectifs et les moyens, sachant trouver dans son travail un rapprochement avec le Créateur.

A la lumière de ces enseignements, « aime le travail », les mots de Chemaya, prennent un nouveau sens.

On ne nous conseille pas de travailler pour des raisons uniquement pragmatiques. Avoir une activité professionnelle comporte des bienfaits dans divers domaines, et permet d’éviter de nombreux écueils.

Travailler à contre-cœur, parce que l’on considère que c’est un impératif dû à notre situation financière, empêche l’homme de profiter réellement de ses bienfaits.

Dans notre monde moderne, où la course aux honneurs et à l’argent est de mise, c’est un défi que de parvenir à garder à l’esprit les paroles de nos sages, et c’est une garantie pour garder un équilibre psychologique.

A nous de renforcer notre foi et notre confiance en D.ieu, en réalisant que ce n’est pas notre activité professionnelle qui est garante de notre prospérité, mais que seule la volonté divine a ce pouvoir.

Chabbath Chalom