Chabbath Parachat Vayichla’h

26, 27 novembre 2004 – 13, 14 kislev 5765

Jérusalem: Paris

Allumage des bougies : 16 h 01 Allumage des bougies : 16 h 40

Sortie de Chabbath: 17 h 14 Sortie de Chabbath : 17 h 52

Très chers amis,

J’ai le plaisir de vous adresser le

dvar Thora

de cette semaine avec lequel nous poursuivons le deuxième chapitre des «Maximes des pères» (Pirké Avoth).

Les commentaires sur le premier chapitre ont fait l’objet d’un livre, le troisième volume de notre série «Dvar Thora» que nous nous ferons un plaisir de vous faire parvenir si vous nous en faites la demande.

Dans le but de diffuser encore et toujours le message éternel de la Thora, nous envoyons ce Dvar Thora à des milliers de personnes francophones dans le monde via Internet.

Comme nous vous l’avons déjà annoncé, la Yéchiva

Daat ‘Haïm

est désormais installée dans de nouveaux locaux, situés face au Mont Herzl à l’entrée de Bayit Vegan, 1, Rehov Hapisga, à Jérusalem (bâtiment Yad Harav Herzog où depuis 40 ans se succèdent les prestigieux commentateurs et chercheurs des 28 tomes de l'Encyclopédie Talmudique et de divers commentaires du Talmud)

Vous comptons sur l’aide de tous nos amis pour pouvoir assumer ce nouveau "challenge" qui permettra à la Yéchiva de poursuivre son essor.

Ici, à Jérusalem, ville éternelle, symbole de la pérennité du peuple juif, nous prions et agissons pour la Délivrance et le Chalom.

Avec notre plus cordial Chabbath Chalom,

Rav Chalom Bettan

Je tenais à remercier tout particuliérement le Rav Ariel GAY et toute la communauté de la rue Garnier pour son excellent acceuil et son soutien.


Chabbath Parachat Vayichla’h

26, 27 novembre 2004 – 13, 14 kislev 5765

Recréer l’équilibre

Par le Rav Eliahou Elkaïm

Cette semaine, nous allons découvrir, dans le texte, la célèbre méthode de Maïmonide pour améliorer son caractère: aller à l’excès inverse de son défaut initial pour ensuite revenir au juste milieu. Une méthode à utiliser avec subtilité…

רבי אומר : איזוהי דרך ישרה שיבר לו האדם ? כל שהיא תפארת לעושה ותפארת לו מן האדם.

«Rabbi disait: Quel est le droit chemin que l’homme doit choisir? Tout chemin dont peut s’honorer celui qui le prend, et pour lequel il est honoré par les autres hommes. »

(Chapitre 2, Michna 1)

Dans le premier chapitre de Hil’hoth Déoth, Maïmonide définit le chemin du milieu (dere’h haemtsaït) qu’il faut prendre pour trouver l’équilibre dans chaque aspect du caractère (midoth). D’après lui, c’est de ce chemin dont parle Rabbi dans notre michna.

Dans le deuxième chapitre, il amène des solutions concrètes à ceux qui vivent dans les ténèbres des complexités caractérielles et, tel un médecin, lui qui en était un éminent, il propose des remèdes efficaces.

Et il faut le savoir, plus ou moins, chacun à notre niveau, nous sommes emprisonnés par des traits de caractère incontrôlés.

"Dans certaines maladies du corps, la sensation du goût est altérée au point que l’amer semble doux et inversement.

Certains malades en viennent même à être attirés par des aliments non-comestibles comme du sable ou de charbon, et à êtres repoussés par des aliments sains comme le pain ou la viande.

Il en est de même pour certaines âmes malades qui s’attachent et affectionnent les mauvaises

midoth

et haïssent le bon chemin."

Quel est le remède pour ces maladies de l’âme?

Rester indifférent

«La meilleure procédure est de se rendre chez les maîtres en Thora (‘

ha’hamim), qui sont de véritables médecins des âmes. Ces derniers leur apprendront les bons concepts, le chemin à suivre, jusqu’à ce que le ‘patient’ guérisse.

Quelle est techniquement la méthode thérapeutique?

A celui qui est coléreux, on lui conseillera, par son travail personnel, de s’habituer à rester indifférent, même si on l’insulte, même si on le frappe. Il devrai agir ainsi jusqu’au moment où il aura la certitude que la colère a été extirpée de son cœur.

A celui qui est orgueilleux,on conseillera d’adopter un comportement où il ne fera aucun cas de sa personne, qu’il reste en retrait, assis au fond de la pièce, et que ses vêtements soient d’une telle simplicité qu’il suscite le mépris des gens. Quand il sera assuré d’avoir déraciné l’orgueil qui est en lui, il pourra revenir au chemin du milieu, qui est la bonne voie.

La même technique doit être employée pour tous les traits de caractères.

Une personne qui a un problème dans un aspect de son comportement, et qui est donc proche d’un extrême, doit alors se forcer à agir selon l’autre extrême, et cela pendant une longue période, jusqu’à ce qu’il reviennent au chemin du milieu.» (Yad ha’hazaka, Hil’hoth Déoth, 2- 1;2)

L’une des explications les plus fréquentes de cette méthode prônée par Maïmonide est que sans ce ‘redressement’ sur une longue période, on ne pourra jamais avoir l’assurance que le ‘malade’ est réellement guéri, et qu’il ne risque pas de retomber dans ses mauvais travers.

Le Rav E. E. Dessler (‘Mi’htav meeliahou’) découvre un élément inédit qui ouvre des horizons nouveaux sur le monde des

midoth.

D’après lui, il existe une autre raison, plus profonde, à la méthode conseillée par Maïmonide.

Pour illustrer son idée, il prend l’exemple de la paresse (atslouth) et de l’entrain (zrizouth).

Ces deux traits de caractère sont diamétralement opposés ; il existe un troisième trait de caractère qui a une certaine ressemblance avec la paresse en cela qu’il est opposé à l’entrain.

Il s’agit de la circonspection (métinouth) attitude posée et réfléchie qui, on le comprend, n’a aucun lien avec la paresse.

Mais on va le voir, cet aspect caractériel va nous aider dans notre démarche.

Colère modérée ou contrôle de la colère ?

Celui qui discerne en lui une forte tendance à la paresse, particulièrement dans ses devoirs envers son Créateur, doit adopter une attitude totalement opposée et briser littéralement sa paresse, en agissant avec entrain et enthousiasme durant une certaine période.

Après avoir atteint son objectif, il doit retrouver le chemin du milieu.

Pour cela, il ne doit pas revenir vers la paresse pour trouver le point d’équilibre, mais aller dans le chemin de la circonspection.

Après avoir brisé la paresse en adoptant un entrain un peu excessif, il ne faut pas chercher à trouver l’équilibre en revenant vers le mauvais extrême d’origine, mais il faut trouver un trait de caractère qui y ressemble, dans le positif.

Et cela s’applique également à toutes les autres caractéristiques du comportement.

Ainsi en est-il de la colère. Après avoir maîtrisé cet aspect du caractère, en s’éduquant à une certaine indifférence, il ne faut pas chercher à revenir à un stade de colère modérée, en pensant trouver là le chemin du milieu.

Il faut tenter de parvenir à un contôle de la colère qui permettra d’utiliser cet aspect du caractère pour exprimer, en temps utile, un certain mécontentement envers ce qui n’est pas juste ou conforme à la volonté divine.

Il faudra tenter de se diriger vers une certaine rigueur, qui n’est en aucun cas de la colère, mais qui peut y ressembler, par certains aspects.

On comprend à présent la nécessité de briser d’abord l’aspect négatif de la midda.

Cette vision des choses va nous aider à régler une apparente contradiction, qui aparaît un peu plus loin dans le texte de Maïmonide.

En effet, Maïmonide prend d’abord, comme nous l’avons vu, la colère et l’humilité (Hil’hoth Déoth 2-2) en exemple pour tous les autres traits de caractère: d’abord aller vers l’extrême opposé puis rechercher le chemin du milieu (1; 4).

Mais plus loin, il précise que deux traits de caractère font exception à la règle, et que pour eux, il faudra rester dans l’extrême opposé, sans poursuivre le chemin du milieu: l’orgueil et la colère (2; 3). Quelle est donc la règle pour ces deux traits de caractère. Faut-il ou non poursuivre le chemin du milieu?

Grandeur de l’homme

Pour mieux comprendre la pensée de Maïmonide, nous citerons brièvement la réponse de Rabbi Eiziq Sher (Leketh Si’hoth Moussar, vol 2 p. 444). Il reprend un texte du Ram’hal au sujet de l’humilité.

«L’humilité s’acquiert par la pensée et les actes. Mais il faut d’abord que l’homme soit humble dans ses pensées. S’il se conduit avec humilité sans avoir créé en lui au préalable des sentiments qui correspondent à son comportement, il agira comme tous ceux dont l’humilité est hypocrite, et qui sont un mal pour le monde.» (Sentier de rectitude chap. 23)

On comprend donc qu’il y a deux stades dans l’amélioration du caractère: la pensée et l’action.

Lorsque Maïmonide dit que l’orgueil et l’humilité font exception à la règle, il parle au niveau de la pensée et des sensations et c’est à ce niveau qu’il conseille de ne pas rechercher le chemin du milieu, car il n’existe pas, dans le cas de l’orgueil d’équivalent positif.

En revanche, en ce qui concerne l’humilité qui s’exprime par des actes, Maïmonide conseille la chemin du milieu, c’est-à-dire un équilibre: ne pas susciter le mépris, mais se conduire avec la dignité qui sied à l’homme, élu par D.ieu pour diriger la création.

On le voit à présent, ce fameux chemin du milieu n’est en aucun cas une recherche d’un comportement moyen, sans réelle ambition. Au contraire, c’est vers un contrôle, une maîtrise parfaite que l’on doit tendre, immense ambition et grandeur de l’homme.

Chabbath Chalom