Chabbath Parachat Vayichla’h

17 décembre 2005– 16 kislev 5766

Jérusalem Montréal Paris
Allumage des bougies16 h 0215 h 54 16 h 37
Sortie de Chabbath 17 h 17 17 h 0217 h 49

Très chers amis,

Je vous adresse le Dvar Thora de cette semaine avec lequel nous poursuivons le deuxième chapitre des «Maximes des pères» (Pirké Avoth) consacré à la naissance de

Shirel Simy Kohav bat Esther Karine & Sarah Suzy bat Rivka Simha

Et à la mémoire de Shlomo ELFASSY (zal) Ben Dina (tihyé)

Les commentaires sur le premier chapitre ont fait l’objet d’un livre, le troisième volume de notre série «Dvar Thora». Et le quatrième volume est déjà sous presse, nous espérons vous le faire parvenir ans les meilleurs délais.

Dans le but de diffuser encore et toujours le message éternel de la Thora, nous envoyons ce Dvar Thora à des milliers de personnes francophones dans le monde, via Internet.

La Yéchiva compte 140 étudiants en pension complète encadrés par 16 Rabbanims enseignants.

Nous comptons sur l’aide de tous nos amis pour pouvoir assumer ce nouveau "challenge" qui permettra à la Yéchiva de poursuivre son essor.

Ce Dvar Thora est écrit par Rav Eliahou Elkaïm pour la guérison (refoua chelema) de son fils ‘Haïm Yéhouda ben Mazaltov.

Ici, à Jérusalem, ville éternelle, symbole de la pérennité du peuple juif, nous prions et agissons pour la Délivrance et la paix. Avec notre plus cordial Chabbath Chalom,

Toute l’équipe de Daat ‘Haïm souhaite à ses lecteurs et à tous ses amis, une année pleine de joie, de bonheurs et de réussite,

Rav Chalom Bettan


Chabbath Parachat Vayichla’h 17 décembre 2005

– 16 kislev 5766

Toujours plus haut

Par le Rav Eliahou Elkaïm

Derrière les mots apparemment anodins de Rabban Yohanan, on découvre, grâce à l’éclairage de nos maîtres, des concepts tout à fait surprenants, notamment le véritable sens de la ‘hassidout …

«Rabban Yohanan ben Zaccaï reçut la tradition de Hillel et de Chamaï. Il disait: ‘Si tu as beaucoup étudié la Thora, n’en tire pas vanité, car c’est pour cela tu as été créé.’ Rabban Yohanan ben Zakaï avait cinq disciples, à savoir: Rabbi Eliezer ben Hyrcan, Rabbi Josué ben ‘Hanania, Rabbi José le prêtre, Rabbi Siméon ben Natanaël, Rabbi Eléazar ben Ara’h.Voici comment il énumérait leurs mérites: Rabbi Eliezer ben Hyrcan: une citerne cimentée qui ne perd pas une goutte. Rabbi Josué: heureuse est celle qui l’a enfanté; Rabbi José: un homme pieux. Rabbi Siméon ben Natanaël: il craint le péché. Rabbi Eléazar ben Arak: une fontaine au jaillissement perpétuel. »

(Chapitre 2, Michna 8)

Découvrons d’abord la notion de ‘l’homme pieux’ (‘hassid), que Rabban Yohanan emploie pour définir Rabbi José Hacohen.

Il est intéressant de citer à ce sujet le commentaire de Maïmonide.

D’après lui, l’expression ‘heureuse est la femme qui l’a enfanté’, qui qualifie Rabbi Josué ben ‘Hanina, se rapporte surtout aux qualités de caractère (midoth): car ce sont ces qualités qui rendent heureux l’intéressé et qui le font aimé et apprécié par tous.

Toujours selon Maïmonide, l’éloge fait sur Rabbi José Hacohen englobe le raffinement du caractère (maaloth hamidoth) mais aussi le niveau très particulier de sagesse (maaloth hassi’hlioth) de ce dernier.

Cette interprétation du terme ‘hassid (pieux) de Maïmonide semble a priori étonnante car on comprend en général ce terme comme définissant une piété particulière, un entrain et un enthousiasme singuliers dans l’accomplissement des commandements (mitsvoth).

Mais on ne le comprend pas dans le sens d’une intelligence ou d’une sagesse hors du commun.

Il faut donc reconsidérer notre conception du ‘hassid.

La foi et la sagesse

Lisons les mots du Ram’hal qui nous éclaire sur la nature véritable de la ‘hassidout.

‘La vertu de ‘hassidout demande une interprétation très poussée. De nombreux comportements et attitudes sont considérés par certains comme l’expression de cette vertu.

Mais il n’en n’est rien: ce ne sont que des esquisses, sans rapport réel avec cette vertu.

Cela est dû au manque de réflexion et de profondeur de la part de ceux qui pensent avoir atteint ce niveau.

Ils n’ont pas investi de grands efforts pour découvrir la voie de D.ieu. Ils ont préféré agir selon leur première perception, sans estimer chaque acte selon les critères de la sagesse (‘ho’hma).

(…) La ‘hassidout véritable est un concept profond qui doit trouver ses fondements dans une sagesse particulière et entraîner un comportement exceptionnel.

Comportement qui sera une raison pour que tout homme qui possède une sagesse du cœur veuille atteindre la ‘hassidout.

Seuls les hommes intelligents y parviendront.

C’est ce que nos maîtres nous expriment en disant:

«L’ignorant (Am haarets) ne peut devenir un homme pieux (‘hassid

(Avoth 2-5)

Le fondement de la ‘hassidout est résumé dans les mots de nos maîtres:

«Heureux est celui dont le labeur est canalisé sur l’étude de la Thora, et qui amène de la satisfaction (na’hat roua’h) à son Créateur» (Talmud Bera’hot 17a)

Quelle vérité cette formule vient-elle exprimer?

Les différents commandements et les devoirs qui incombent à chaque Juif sont connuset clairement définis.

Cependant, celui qui porte au créateur un amour véritable ne cherchera pas seulement à se rendre quitte de ses obligations.

Il agira comme un fils qui porte à son père un amour indéfectible.

Si un père dévoile ne serait-ce qu’une fraction de ses volontés, son fils multipliera les efforts pour les accomplir.

Et même dans le cas où ce père ne s’est exprimé qu’une fois, et à demi-mot, le fils comprendra exactement les attentes de son père.

Si le fils sait que son action provoquera un certain plaisir (na’hat roua’h) à son père, il n’attendra pas que ce dernier s’exprime explicitement.

Nous pouvons observer ce phénomène dans les relations entre deux amis intimes, ou entre deux conjoints, ou encore entre parents et enfants.

La volonté de D.ieu

La règle s’énonce ainsi: lorsque l’amour est réciproque, on ne dit jamais: «Je ne fais que ce qui m’a été demandé explicitement». Mais on cherchera à déceler l’intention profonde de celui qui nous a sollicité, et l’on fera tous les efforts pour créer une satisfaction chez l’autre.

C’est exactement de cette façon qu’agit celui qui porte un amour sincère à son Créateur.

Les commandements ne sont là que pour dévoiler la volonté réelle de D.ieu.

Il ne dira certainement pas: «Il me suffit d’accomplir ce qui a été explicitement demandé pour me rendre quitte de mes obligations».

Bien au contraire, il se dira: «Si j’ai découvert que la volonté du Créateur va dans ce sens, cela m’indique où multiplier mes efforts. Cela me demande d’élargir mon action dans tous les domaines où je comprends que se porte la volonté divine.»

C’est le sens véritable de: «qui amène de la satisfaction (na’hat roua’h) à son Créateur».

Le sens général de la ‘hassidout est donc d’élargir dans tous les domaines et toutes les conditions, l’accomplissement des commandements.»

(Sentier de rectitude chapitre 18)

Comme le Ram’hal le précise plus loin, cela implique un discernement très particulier, car il ne faudrait pas que le renforcement d’un commandement soit au détriment d’un autre ou au détriment de ses devoirs envers son prochain.

Il faut également atteindre un niveau de connaissance qui permette de comprendre le sens profond des commandements et leurs lois.

On comprend maintenant que Maïmonide définisse la ‘hassidout par une synthèse entre le raffinement du caractère et un niveau de sagesse très particulier.

Nous allons découvrir que l’éloge fait à Rabbi Simon ben Natanaël recouvre lui aussi plusieurs aspects.

«Rabbi Simon ben Natanaël: il craint le péché»

Nous avons eu l’occasion de rencontrer ce concept plus haut dans la Michna 5:

«L’homme frustre ne peut craindre le péché». On peut déduire de cette phrase que mis à part l’homme frustre (Bour) tout le monde peut atteindre cette vertu, même l’ignorant (Am haarets).

Est-ce donc là le compliment que fait Rabban Yohanan à son disciple?

Un éloge étincelant

Maïmonide donne une première direction de réflexion:

«Craindre le péché: il s’agit du fait d’agir promptement (zerizouth), de faire des efforts constants pour s’attacher au Bien, et de fuir tout action liée au Mal.

Rabbi Haïm de Volozhine précise encore:

«Rabbi Yohanan utilise un concept différent de la crainte dont il est question dans la Michna 5.

Ici, il est question d’une crainte comparable à celle qui nous fait fuir un serpent venimeux ou un feu dévorant. C’est exactement cette sensation que Rabbi Simon ressentait à l’égard d’une faute (avéra): c’est un niveau extraordinaire.»

(Roua’h Haïm ibid.)

Le ‘hassid Rabbi Yossef Yaavetz va encore plus loin:

«Sache que la crainte du péché dont parle Rabban Yohanan est une vertu extraordinaire. Elle est placée, sur l’échelle de Rabbi Pin’has Ben Yaïr, juste après l’humilité, c’est-à-dire presque au summum de l’élévation morale.

Abraham y est parvenu seulement après le sacrifice d’Isaac:

«Désormais, J’ai constaté que tu crains D.ieu» (Genèse 22-12)

Car il y a deux niveaux de crainte du péché. Le premier est celui d’une peur au moment de l’action qui va provoquer la punition divine.

Le deuxième niveau est une sensation extraordinaire que ressentent certains êtres d’exception, qui agissent seulement par amour envers le Créateur, sans attendre aucune rétribution.

Ils sont motivés par la crainte de faillir à leur devoir, ils n’ont jamais la sensation d’être exceptionnels (tsadik im) car ils ont conscience à chaque instant que leurs bonnes actions ne sont que l’expression de leur devoir. (…)

C’est ce que Jacob a exprimé en disant:

«Je suis peu digne de toutes les faveurs et de toutes la fidélité que tu as témoignée à ton serviteur» (Genèse 32-11)

Le Ram’hal (Sentier de rectitude chapitre 24), va dans le même sens et ajoute que cette sensation est l’expression, ainsi que la mise en pratique, de la crainte devant la toute-puissance du Créateur (yirath haromémouth), le niveau le plus élevé auquel l’homme puisse aspirer.

Derrière les mots presque neutres, à première vue, de Rabban Yohanan à l’égard de ses disciples, on discerne, à présent, grâce à l’éclairage de nos maîtres, la portée de sa pensée et l’éloge étincelant qu’il leur fait.

Chabbath Chalom