TICHRI 5767

14/15 octobre 2006 – 22/23

Jérusalem Paris Montréal
Allumage des bougies16.58 19.0018.05
Sortie de Chabbath17.5320:0419:07

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Très chers amis,

Je vous adresse un Dvar Thora sur SOUCOT à la mémoire de

Madame Zahra BETTAN bat Rahel

& de Chlomo Ben Rahel GARCON

Dans le but de diffuser encore et toujours le message éternel de la Thora, nous envoyons ce Dvar Thora à des milliers de personnes francophones dans le monde, via Internet.

Cette année, notre Institution a emménagé dans un nouveau bâtiment, qui porte dorénavant le nom de BEIT YEHOUDA VEHANA au nom de la famille qui a contribué au financement de cette acquisition ; notre reconnaissance est infinie tant pour cette famille que pour tous nos généreux donateurs et amis.

Le bâtiment est situé face au Mont HERZL et nous serons toujours heureux de pouvoir vous y accueillir avec les 18 enseignants, les 10 avrehim et les 153 étudiants.

Durant les vacances scolaires, nous avons mis le bâtiment à la disposition des familles du nord du pays qui recherchent un peu de répit.

Pour visualiser les photos et le film d'inauguration du bâtiment à Jérusalem vous pouvez cliquer sur le lien suivant :

Evenement

Ce Dvar Thora est écrit pour la guérison (refoua chelema) du fils de

Rav Eliahou Elkaïm,

‘Haïm Yéhouda ben Mazaltov

Ici, à Jérusalem, ville éternelle, symbole de la pérennité du peuple juif, nous prions et agissons pour la Délivrance, la réussite, la bonne santé et la paix en cette année 5767.

Avec notre plus cordial Chabbat Chalom et nos vœux les plus chaleureux de Hag Saméah,

Rav Chalom Bettan


La double joie

Par le Rav Eliahou Elkaïm

Le peuple Juif a reçu un cadeau inestimable. Il lui a été transmis des mains de D.ieu Lui-même. Moïse, en brisant les premières tables de la loi, a finalement permis que la Thora soit adaptée à notre niveau. A nous de savoir goûter la joie que ce fabuleux présent doit susciter…

La fête de Chemini Atséreth et Sim’hath Thora, qui clôture les solennités du mois de Tichri, est considérée dans les textes comme l’apothéose de la période sacrée qui commence à Roch Hachana. Pourquoi ? Nous allons tenter de découvrir l’identité propre de ces journées uniques.

En réalité, en Israël, on ne fête qu’un seul jour de Chemini Atséreth, et Sim’hath Thora a été fixée ce même jour.

C’est en dehors d’Israël, (‘Houts la’aretz), que l’on fête deux jours de Chemini Atséreth et c’est le deuxième jour que l’on fête Sim’hath Thora.

C’est à cette occasion qu’on lit la dernière paracha de la Thora et que l’on commence un nouveau cycle, avec la lecture des premiers passages de Béréchith (La Genèse)

Fait étonnant, cette fête de Sim’hath Thora n’est pas mentionnée dans la Thora, ni même dans le Talmud ! C’est seulement à l’époque des Guéonim, du 8ème au

11ème siècle que fut fixée la coutume de danser avec les rouleaux de la loi autour de la Téba, et de focaliser les réjouissances sur la Thora elle-même.

Ces réjouissances sont juxtaposées à la joie occasionnée par la fête de Chemini Atséreth.

Cette décision (Takana) des Guéonim suscite plusieurs questions :

D’abord, pourquoi avoir fixé de fêter la Thora à cette période de l’année, alors qu’il aurait été plus logique de le faire à Chavouoth, date anniversaire de la révélation du Sinaï, où la Thora a été transmise au peuple d’Israël.

Ensuite, et dans le même ordre d’idée, il aurait été plus normal de commencer la lecture de la première paracha de Béréchith à Chavouoth, et de terminer le cycle des parachioth au même moment, car cela aurait uni les deux éléments : le don de la Thora et la fin d’un cycle d’étude annuelle de cette même Thora.

Enfin, et cela regroupe les deux premières questions, pourquoi avoir scindé en deux parties les réjouissances autour de la Thora ?

Coutumes juives

Une dernière interrogation concerne les textes de la Thora que nous lisons le jour de Sim’hath Thora. Il s’agit de la paracha

Vezoth Habera’ha(dernière paracha de Devarim, le Deutéronome) et des premiers passages de Berechith, (la Genèse).

Cela est déjà précisé dans le Talmud (Méguila 31a) bien avant la Takana

des Guéonim fixant Sim’hath Thora le premier ou le deuxième jour de Chemini Atséreth.

Par ailleurs, le Talmud (Méguila 32 a) nous apprend qu’à chaque fête, nous avons le devoir de lire dans LeSéfer

Thora les textes en rapport avec cette même fête. Nos maîtres ont déduit cela du verset :

«Et Moïse exposa les Solennités de l’Eternel aux enfants d’Israël. » (Lévitique 23 ; 44).

Mais alors, quel est le rapport entre la fête de Chemini Atséreth et la lecture de Vezoth Habra’ha, où cette fête n’est même pas mentionnée ?

Cela ne peut être expliqué par le seul fait qu’à ce moment-là de l’année, on doit terminer le cycle des parachioth car Maïmonide (Yad Ha’hazaka, Hil’hoth Tefila13 ; 1) fait acte de deux coutumes différentes concernant la lecture de la Thora :

«La coutume la plus répandue en Israël, est de terminer chaque année la lecture de tous les livres de la Thora, en commençant par la parachath Berechit le chabbath qui suit la fête de Souccoth, et en terminant la dernière paracha à la fête de Souccoth ; selon certaines coutumes, moins répandues, on termine le corpus de la Thora en trois ans. »

On le voit, Chemini Atséreth n’est pas nécessairement lié à la conclusion de la lecture de la Thora.

Cela renforce notre question au sujet du lien qui unit cette fête à cette paracha.

Dans son ouvrage « ‘Hever ma’amareï Hathora’, le Rav Sim’ha Zissel Broïde zatsal(Roch Yéchivath ‘Hevron à Jérusalem) nous fait découvrir le véritable rapport entre Chemini Atséreth et Sim’hath Thora, et nous éclaire sur le sens de cette dualité des réjouissances autour de la Thora.

« Votre départ m’est douloureux »

Chemini Atséreth est mentionné deux fois dans la Thora.

La première fois dans la Parachath Emor :

«Le huitième jour, vous aurez encore une convocation sainte, et vous offrirez un sacrifice à l’Eternel. C’est une fête de clôture, vous n’y ferez aucune œuvre servile » (Lévitique 23 ; 36)

Le mot Atséreth (traduit littéralement par clôture) est expliqué différemment par Rachi :

«C’est un arrêt ; Je vous ai retenu chez Moi (D.ieu) tel un roi qui a invité ses enfants à un festin pour un certain nombre de jours. Lorsque le temps est venu de prendre congé, il dit : ‘Mes enfants, je vous prie de rester chez moi encore un jour, votre départ m’est douloureux’» (Rachi ad hoc)

Le deuxième passage dans lequel Chemini Atséreth est mentionné, se trouve dans la Parachath Pin’has :

« Le huitième jour, il y aura pour vous une fête de clôture, vous ne ferez aucune œuvre servile » (Nombres 29 ; 35)

Rachi rapporte au nom du Talmud (Soucca 55) :

« C’est parce que pendant les sept jours de Souccoth, les soixante-dix taureaux offerts en sacrifice correspondent aux soixante-dix nations. C’est pour ces soixante-dix nations qu’Israël implore D.ieu afin qu’Il leur accorde Sa bénédiction ; lorsque arrive le moment de la séparation, D.ieu s’adresse à Israël : ‘Je vous en prie, préparez-moi un repas sobre (séouda ketana) pour que Je puisse avoir du plaisir avec vous.’ » (Rachi ad hoc)

Le Midrach est plus explicite :

« Lorsque se sont écoulés les sept jours de la fête, D.ieu dit à Israël : ‘A présent,Moi et vous allons nous réjouir ensemble, et Je ne vais pas beaucoup vous importuner. Il suffira comme sacrifice d’un taureau et d’un bélier ; en entendant cette requête, Israël loue D.ieu en disant : ‘Ce jour, le Seigneur l’a préparé. Consacrons-le par notre joie, par notre allégresse.» (Psaumes 118 ; 24)

Rabbi Avin dit : ‘Il n’est pas précisé dans ce verset si nous nous réjouissons du jour de fête ou de D.ieu lui-même. C’est Salomon qui vient spécifier :

‘Mais c’est en Toi que nous cherchons joie et allégresse

’ (Cantique des Cantiques 1 ; 4)

Il faut comprendre :

« En Toi et ta Thora, en Toi et ta délivrance’ » (Yalkouth Chimoni chapitre 782)

Deux notions se dégagent de ces versets concernant Chemini Atséreth.

La première est celle de la proximité et de l’affection

toute particulière témoignée par D.ieu à l’égard d’Israël quand Il dit : « Votre départ m’est douloureux»

Ces mots étant le motif de cette fête supplémentaire, ils expriment de façon prenante l’amour de D.ieu envers Israël.

La deuxième est celle de l’union

entre D.ieu et Israël, union exprimée dans les mots du Talmud et du Midrach : « Nous allons nous réjouir

ensemble, entre nous. »

Union parfaite où aucun élément étranger ne sera admis.

Des chants et des louanges

Dans son commentaire sur le verset de la parachath Emor, le Sforno précise encore le concept de Atséreth et la forme sous laquelle il doit être exprimé.

Atséreth est un arrêt (atsira) : Cela ne signifie pas seulement une obligation d’arrêter tout travail interdit, mais cela implique également un recueillement dans les endroits de culte pour servir D.ieu par l’étude de la Thora, les prières et le service divin.

(…) Le jour qui suit la fête de Souccoth, et qui clôt le cycle des trois fêtes annuelles (Chaloch Régalim), est sanctifié comme un jour de rassemblement dans les endroits de culte, et cela dans le but d’une réjouissance pure de Thora et de mitsvoth, comme il est dit :

«Qu’Israël se réjouisse de son créateur » (Psaumes 149 ; 2)

On le voit, la fête de Chemini Atséreth représente l’union parfaite d’Israël avec son créateur, qui s’exprime par une joie intense se cristallisant sur la Thora et les Mitsvoth, et qui se manifeste dans les lieux de culte par des chants et des louanges adressés à D.ieu.

Mais il nous reste à éclaircir maintenant le rapport entre Chemini Atséreth et la fête de la Thora elle-même, qui aurait dû être célébrée à Chavouoth seulement.

Pour y parvenir, le Rav Broïde discerne deux aspects du don de la Thora à la communauté d’Israël.

Un cadeau se mesure par la valeur de l’objet lui-même et aussi par sa provenance, à savoir la personne qui l’offre.

Un cadeau, même s’il est banal, s’il a été octroyé par le roi ou par une personnalité de premier plan, représentera aux yeux de son récepteur une valeur toute particulière, du simple fait qu’il est la marque d’une distinction, le signe d’un hommage.

La Thora, outre sa valeur incommensurable, nous vient de D.ieu Lui-même.

Ces deux éléments exigent deux manifestations distinctes de reconnaissance et de joie.

Nouvelles conditions

les Guéonim, qui ont fixé Sim’hath Thora à une autre date qu’à Chavouoth, ont voulu préciser le deuxième aspect du don de la Thora : celui d’être issu de D.ieu Lui-même. Fêter la Thora seulement à Chavouoth n’aurait pas suffisamment mis en relief ce double aspect.

Mais dans le choix de Chemini Atséreth, ils n’ont pas seulement pris en compte le fait que ce soit le jour de l’union avec D.ieu.

En réalité, ce jour est intrinsèquement lié à la transmission de la Thora directement des mains de D.ieu. Pourquoi ?

Il faut revenir quelque peu en arrière pour établir ce lien…

Les premières tables de la loi transmises au Sinaï ont été brisées par Moïse après la faute du veau d’or.

Après les deux périodes de quarante jours pendant lesquelles Moïse a intercédé en faveur d’Israël dans les cieux, il reçoit l’ordre de forger les deuxièmes tables.

Avec ces tables, il redescend vers le peuple le jour de Kippour, et ainsi a lieu la deuxième réception de la Thora (Kabbalath hathora)

D.ieu accepte encore une fois de remettre la Thora à Israël, mais sous de nouvelles conditions : Forgées dans la pierre par Moïse, ces tables représentaient le travail de l’homme, symbole du travail permanent que les Juifs devraient accomplir pour conserver la Thora dans leurs cœurs, travail qui n’aurait pas été nécessaire avec les premières tables.

D’après nos maîtres, cette seconde kabalath hathora

va créer une nouvelle proximité avec D.ieu, qui va s’exprimer dans toute sa grandeur à Souccoth, et enfin culminer le jour de Chemini Atséreth.

En ce jour, et plus que jamais, la proximité avec D.ieu est éclatante, car après la faute, D.ieu pardonne et nous transmet à nouveau Sa Thora. Il n’y a pas de moment plus propice pour fêter que D.ieu

Lui-même

nous a donné Sa Thora.

Chemini Atséreth, on se réjouit de Celui dont provient le cadeau.

A Chavouoth, c’est le cadeau lui-même que l’on fête et que l’on honore : la Thora est la source de notre réjouissance.

Cela est très bien exprimé par les fameuses paroles de Rav Yossef (Talmud Pessa’him 68b), qui exprime dans sa prise de conscience que sa valeur ne vient que du fait qu’il est un érudit, imprégné de Thora et de la connaissance de D.ieu :

« Ne serait-ce ce jour (Chavouoth), combien de Yossef y a-t-il sur la place publique ? »

S’il n’y avait eu le jour de Chavouoth où le peuple juif a reçu la Thora, il serait c un individu comme tous les autres et n’aurait aucune valeur spécifique…

C’est la Thora, qui permet à l’homme de s’élever, que nous fêtons le jour de Chavouoth.

A Chemini Atséreth, apothéose de notre rapprochement avec D.ieu, point culminant de la deuxième kabalath hathora, il est propice de fêter

Celui qui nous a fait ce cadeau.

Brisées

On comprend à présent que le cycle de la lecture de la Thora se termine justement à Chemini Atséreth et que la dernière paracha, Vezoth habera’ha, est intimement liée à cette fête.

A ce propos, il est intéressant de se pencher sur le dernier verset de la Thora :

«Ainsi qu’à cette main puissante et à toutes ces imposantes merveilles que Moïse accomplit aux yeux de tout Israël» (Deutéronome 34 ; 12).

Que signifie aux yeux de tout Israël ?

Rachi (ad hoc) explique :

« (Moïse) qui a eu le courage de briser les tables de la loi devant leurs yeux… Et la volonté divine a donné son assentiment comme il est écrit : ‘Que tu as brisé’ (Exode 34 ; 1), Sois félicité d’avoir agi ainsi. »

La Thora ne pouvait-elle trouver un sujet plus universel que de rappeler, dans ses trois derniers mots, la faute du veau d’or et la réaction de Moïse ?

C’est que Moïse, par son acte, a permis l’octroi des deuxièmes tables.

Ces deuxièmes tables mettent en relief que, envers et contre tout, et surtout malgré les fautes du peuple d’Israël, D.ieu Lui-même a voulu nous transmettre à nouveau la Thora.

C’est la raison pour laquelle ces mots ont été choisis pour conclure les cinq livres de la Thora : Si Moïse n’avait pas brisé les premières tables (qui, après la faute du veau d’or, ne correspondaient plus au niveau spirituel du peuple juif), nous n’aurions pas eu la possibilité de recevoir les deuxièmes, celles qui ont été conçues à notre portée pour toutes les générations.

C’est donc ce qui a permis que la Thora reste au sein du peuple juif. Et c’est cet élément aussi que nous fêtons à Chemini Atséreth.

Intensité inégalée

Ces notions que nous avons développées ne doivent pas rester de belles paroles abstraites.

Car la Thora trouve toujours sa concrétisation dans les actes des Juifs. Voici donc une description authentique de la manière dont Rabbi Israël Salanter et ses disciples les plus proches fêtaient Sim’hath Thora.

C’est le Rav Y.Y. Weinberg (l’un des géants en Thora de la dernière génération) qu’il l’a entendu de la bouche de Rav Its’hak Blazer (élève de prédilection du grand maître), lui-même témoin de cette scène (Lifrakim p.37).

A la fin de ses jours, Rabbi Israël Salanter fêtait Sim’hath Thora chez lui, entouré de ses disciples, les grands maîtres du Moussar.

La joie qui régnait était d’une intensité inégalée et ces hommes, d’une immense carrure spirituelle, dansaient, enthousiasmés, avec le Sefer Thora.

Au moment le plus intense, Rabbi Israël Salanter quitta subitement les rondes, s’assit de côté et pleura.

Après une certaine hésitation, l’un des ses plus proches disciples osa lui demander la cause de ses larmes.

Rabbi Israël lui répondit : « Mon chagrin est issu de notre joie. C’est en réalisant à quel point nous devons nous réjouir de la Thora que j’éprouve une peine immense : ai-je vraiment étudié et suivi les préceptes de la Thora sans faillir ? »

A la suite de ces paroles, tous ceux qui assistaient à cette scène pleurèrent à leur tour. La joie intense s’était transformée en un concert de pleurs.

Alors, Rabbi Israël se leva et s’adressa à ses disciples : « Mes frères, nous pouvons à présent véritablement ressentir cette joie qui est la nôtre.

Seul celui qui est véritablement attaché à la Thora peut avoir cette sensation profonde de n’avoir pas rempli son devoir vis à vis d’elle.

Nos larmes sont la preuve de notre lien indélébile avec la Thora et, à présent, nous pouvons véritablement nous réjouir. »

Nous sommes très loin de ce niveau d’attachement à la Thora et de cette sincérité. Mais Sim’hath Thora est là pour provoquer, à travers la joie extériorisée, une prise de conscience.

D.ieu Lui-même nous a fait un cadeau extraordinaire. A nous de prendre de nouvelles résolutions pour renforcer notre attachement à ce cadeau et à Celui qui nous l’a offert.

Ce sera la véritable raison de nous réjouir le jour de Sim’hath Thora.